Inclusion Canada et Personnes d’abord du Canada (PFC), en collaboration avec le Bureau de la condition des personnes handicapées (BPCH) d’Emploi et Développement social Canada, ont présenté le 3 décembre dernier le 11e Forum annuel des politiques sur l’inclusion, lequel a été tenu pour la première fois dans un cadre virtuel. Cette année, le thème était Déficiences intellectuelles et COVID-19 : Les défis, les occasions et le chemin à parcourir –  les leçons des laissés pour compte. Alors que le gouvernement du Canada s’oriente vers la relance qui suivra la pandémie, le Forum des politiques a permis de mieux comprendre de quelle façon le Canada peut poursuivre les progrès réalisés pour soutenir les personnes ayant des limitations fonctionnelles dans le monde d’après la COVID-19.

La journée a débuté par une reconnaissance territoriale et le mot de bienvenue de Robin Acton, la présidente d’Inclusion Canada, et de Kory Earle, le président de Personnes d’abord du Canada. Nous étions reconnaissants de la présence de l’honorable Carla Qualtrough, ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées et de Neil Belanger, directeur général de la British Columbia Aboriginal Network on Disability Society (BCANDS), qui ont prononcé le discours d’ouverture du forum. Le discours a porté sur le travail du Groupe consultatif sur la COVID-19 en matière des personnes en situation de handicap (GCCPSH) du gouvernement fédéral.

La ministre Carla Qualtrough a expliqué de quelle façon le GCCPSH a modifié le soutien que le Canada apporte aux personnes ayant des limitations fonctionnelles en réaction à une crise, en soulignant l’importance de passer à l’action puisque « nos systèmes fonctionnent comme ils ont été élaborés et ils n’ont tout simplement pas été élaborés pour inclure tout le monde. Voilà ce que nous devons modifier ».

Neil Belanger s’est exprimé sur son rôle de coprésident du GCCPSH et sur ce qu’il souhaite à l’avenir du gouvernement fédéral en matière de soutien en réponse à la récente création du Groupe consultatif ministériel en matière des personnes en situation de handicap (GCMPSH), la nouvelle mouture du Groupe consultatif sur la COVID-19, afin d’aborder les priorités cernées par le discours du Trône de l’automne 2020 : « Chacun de nous ici présent est un architecte qui bâti de meilleurs systèmes à l’intention des personnes en situation de handicap ».

Inclusion Canada a l’honneur d’annoncer que le GCMPSH sera présidé par la vice-présidente à la direction d’Inclusion Canada, Krista Carr.

« Le problème, c’est que nos systèmes fonctionnent comme ils ont été élaborés et ils n’ont tout simplement pas été élaborés pour inclure tout le monde. Voilà ce que nous devons modifier. »

– L’honorable Carla Qualtrough, ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées

Groupe 1 : Éthique et accessibilité en matière de soins de santé

Le premier groupe de la journée a abordé la question des services de soins de santé accessibles en temps de pandémie et des améliorations éventuelles à apporter au système afin de mieux soutenir les personnes ayant des limitations fonctionnelles. Kory Earle et Victor Pereira, qui défendent leurs propres droits, ont discuté de la santé mentale en tant que pandémie en soi, en racontant leur expérience de recherche de ressources adéquates. Personnes d’abord du Canada et le Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH) ont conçu un cours virtuel de six semaines sur la santé mentale qui propose aux personnes participantes de partout au pays un espace ouvert et sécuritaire pour « améliorer leur propre vie », comme le dit Victor Pereira. Kory Earle et Victor Pereira ont également invité le gouvernement à veiller à ce que les mesures de soutien en santé mentale continuent d’être une priorité des soins de santé.

Marc Muschler d’Inclusion Canada a présenté une perspective familiale sur l’accès aux soins de santé accessibles pendant la pandémie, en évoquant les difficultés rencontrées par son frère Michael pour passer en toute sécurité un test de dépistage de la COVID-19 au début de la pandémie en tant que personne ayant des limitations développementales et dont le système immunitaire est affaibli. Son expérience montre que le bien-être des personnes ayant des limitations fonctionnelles n’était pas une priorité durant la pandémie, malgré leur situation vulnérable au sein de la société.

« Ce système même qui a été mis en place pour soutenir [les personnes ayant des limitations fonctionnelles] en temps de pandémie jouait contre ces personnes et mettait leur vie en danger. »

– Marc Muschler, frère et défenseur

Mariam Shanouda, une avocate du ARCH Disability Law Center, a exprimé des préoccupations concernant les protocoles de triage en place qui prioriseraient la santé de certaines personnes au détriment de celle d’autres personnes lorsque les besoins de services de soins intensifs sont plus importants que les ressources disponibles. Elle a souligné que la pandémie a révélé des protocoles de triage discriminatoires ou inexistants dans certaines provinces et certains territoires. ARCH et plus de 60 autres organismes se sont donné pour priorité d’inciter le gouvernement à inclure les personnes ayant des limitations fonctionnelles dans le processus de consultations. Le groupe a adopté une approche fondée sur les droits de la personne en rédigeant des lettres ouvertes qui invitent à passer à l’action.

Yona Lunsky, Ph. D., du Centre Azrieli sur les troubles du développement du cerveau et les maladies mentales des adultes du CAMH a discuté de l’impact de la pandémie sur l’accessibilité à l’information en matière de soins de santé. Bien que la pandémie ait mis en lumière l’efficacité de rendre les informations accessibles en ligne, il est important de continuer à présenter le contenu sous différents formats afin d’en garantir l’accessibilité. De plus, le Dr William (Bill) Sullivan, professeur agréé, médecin de famille et directeur du Programme de soins primaires pour les troubles du développement (DDPCP) du centre Surrey Place, a exposé le cadre d’éthique en santé publique du gouvernement du Canada, en soulignant que l’approche du pays doit veiller au bien-être de l’ensemble de sa population, et pas simplement au plus grand bien du plus grand nombre. L’inclusion est nécessaire à la prise des décisions qui concernent les personnes et les groupes, et les soins de santé ne représentent qu’un des domaines où cette réalité est manifeste.

Groupe 2 : Pauvreté et réforme de la sécurité du revenu

Le deuxième groupe du forum s’est penché sur le crédit d’impôt pour personnes handicapées (CIPH) et la sécurité du revenu, du point de vue des personnes ayant des expériences vécues et des spécialistes en matière de politiques. Chris Rowley, un Albertain qui défend ses propres droits, a parlé de ses expériences de demande de CIPH, affirmant que le processus était intimidant et accablant. Selon lui, il était aussi difficile de remplir la demande de paiement unique aux personnes en situation de handicap relatif à la COVID‑19. Joanna Gauthier, qui défend également ses propres droits, a expliqué de quelle manière la pandémie a exacerbé ses propres difficultés financières, ce qui est le cas de plusieurs personnes ayant des limitations fonctionnelles au pays.

Les préoccupations de Chris Rowley et de Joanna Gauthier ont mené à une discussion sur les améliorations à apporter aux systèmes en place pour les personnes ayant des limitations fonctionnelles. Laurie Beachell, ancienne coordonnatrice du Conseil des Canadiens avec déficiences (CCD), a examiné le crédit d’impôt pour personnes handicapées (CIPH) comme modèle de sécurité du revenu ayant une approche médicale des limitations fonctionnelles qui présente de nombreux enjeux. En redéfinissant son objectif et en le considérant de façon plus englobante, il est possible de veiller davantage à offrir un accès équitable au supplément de revenu. La simplification des formulaires et la création d’un service d’assistance téléphonique ou d’un programme de sensibilisation pour venir en aide aux personnes ayant des limitations fonctionnelles sont des éléments qui ont été étudiés.

Sherri Torjman, vice-présidente du Comité consultatif des personnes handicapées (CCPH) qui relève du ministre du Revenu national, a présenté la prestation canadienne pour les personnes en situation de handicap proposée par le gouvernement fédéral dans le discours du Trône de l’automne 2020. Elle a souligné l’importance d’adapter, à court terme, la nouvelle prestation aux programmes actuels afin qu’aucune personne ayant des limitations fonctionnelles au Canada ne vive dans la pauvreté. Sherri Torjman a également souligné la nécessité d’élargir l’admissibilité afin d’établir une fondation plus solide de sécurité du revenu pour les années à venir.

Michael Prince, Ph. D., a traité de la prestation canadienne pour les personnes en situation de handicap proposée.

Michael Prince, professeur de politique sociale à l’Université de Victoria et défenseur de longue date des personnes ayant des limitations fonctionnelles, a conclu la discussion en donnant son opinion en ce qui a trait à la nouvelle prestation canadienne pour les personnes en situation de handicap. Il a indiqué que l’admissibilité devait être à la fois inclusive et moderne pour traiter des enjeux pressants de la communauté des personnes ayant des limitations fonctionnelles comme l’insuffisance du revenu, le chômage et le sous-emploi, et l’inaccessibilité de plusieurs programmes et prestations du gouvernement fédéral. Comme l’a indiqué Krista Carr au cours de la période de questions de ce groupe, « la pandémie a démontré qu’il existe d’autres façons de faire les choses ». La diffusion des différents points de vue et l’adoption de l’inclusion à tous les paliers gouvernementaux sont essentielles à la création de changement.

Groupe 3 : La réalité des soins collectifs en temps de pandémie

Le dernier groupe de la journée s’est penché sur la question de l’institutionnalisation et de la COVID-19.  Kevin Johnson, qui défend ses propres droits, a parlé de son expérience en tant que bénéficiaire de services aux personnes ayant des limitations fonctionnelles en temps de pandémie en mettant l’accent sur les difficultés à contourner les règles des prestataires de services afin que sa fiancée puisse rester avec lui ou qu’il puisse voir sa famille. Selon lui, il ne revient pas à un organisme de décider ce qui est sécuritaire pour lui. Les personnes ayant des limitations fonctionnelles ont le droit de prendre les mêmes décisions que l’ensemble de la population, en tenant compte de la tolérance au risque et des choix personnels. Toutefois, plusieurs résidents des établissements de soins de longue durée ou bénéficiaires de mesures de soutien aux personnes ayant des limitations fonctionnelles n’en ont pas l’occasion. 

John Leggat, président et directeur général de St.Amant, a fait écho à ces idées en parlant de son expérience de fournisseur de services résidentiels au Manitoba. Il a souligné la nécessité de créer des réseaux de soutien, tant du point de vue du gouvernement que de celui de la communauté, afin de veiller à ce que les personnes ayant des limitations fonctionnelles puissent prendre leurs propres décisions et vivre une vie fondée sur les droits en ayant la capacité d’agir.

À titre de représentante du Bureau de l’administratrice en chef de la santé publique du Canada, Bonnie Hostrawser a présenté le document de l’Agence de la santé publique du Canada portant sur la COVID-19 et ses répercussions sur les personnes ayant des limitations fonctionnelles. En considérant les répercussions des soins collectifs sur la susceptibilité des pensionnaires à contracter le virus, elle a souligné la nécessité de transformer les systèmes actuels de façon durable. Elle a mis l’accent sur l’importance du travail collaboratif au sein de nos communautés afin de soutenir tout le monde avec des services accessibles et une abondance d’informations alors que le pays se remet de la pandémie.

Bonnie Hostrawser présentant le document de l’Agence de la santé publique du Canada portant sur la COVID-19 et ses répercussions sur les personnes ayant des limitations fonctionnelles.

En conclusion du troisième groupe, Barbara Gillis a fait part de son point de vue sur l’institutionnalisation en tant que mère d’un fils ayant un trouble du spectre de l’autisme (TSA). Elle a précisé que les règles des habitations collectives déterminent de quelle façon les résidents vivent leur vie et que ce qui se passe derrière les portes closes ne serait pas acceptable en dehors d’un tel établissement. « Ce dont [mon fils] a besoin, c’est d’acceptation et de patience », insiste-t-elle; des propos qui ont trouvé écho auprès de bien des participants et des présentateurs.

Mot de la fin

La journée s’est conclue avec le mot de la fin de la vice-présidente à la direction d’Inclusion Canada, Krista Carr, de la directrice générale de Personnes d’abord du Canada, Shelly Fletcher, et de la directrice générale du Bureau de la condition des personnes handicapées (BPCH) d’Emploi et Développement social Canada, Krista Wilcox. Leur message général d’espoir et de résilience en a inspiré plus d’un. Comme l’a souligné Krista Carr, « c’est à notre tour, les communautés des personnes ayant des limitations fonctionnelles, de saisir l’occasion au vol… de nous lever et de travailler de manière collaborative, toutes ensemble, pour sortir de cette pandémie plus fortes qu’avant ».

Le 11e Forum annuel des politiques sur l’inclusion a démontré que la pandémie de la COVID-19 nous a donné l’occasion de réévaluer l’inclusion au Canada et d’apporter les changements nécessaires afin de bâtir un pays pleinement inclusif et accessible pour les personnes ayant des limitations intellectuelles et leur famille.


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