Le 17 mars 2021, la vie des personnes en situation de handicap au Canada a changé à jamais, lorsque le gouvernement fédéral a légalisé l’aide médicale à mourir (AMM) pour les personnes en situation de handicap.
L’AMM sur la base du handicap continue d’être un sujet de débat majeur au Canada, tandis que le Comité mixte spécial sur l’AMM se penche sur les récents changements apportés à la loi. Le Comité envisage trois domaines d’expansion potentielle de l’AMM :
- Mineur(e)s matures ;
- demandes anticipées ; et
- maladie mentale.
En réponse, nous avons remis au Comité plusieurs dossiers contenant nos positions et nos préoccupations. Notre objectif est d’influencer le travail du Comité et de défendre vos droits.
Protection des personnes en situation de handicap
Le handicap est une catégorie protégée par la Charte des droits et libertés. Rendre légal le fait de mettre fin à la vie d’une personne en raison de son handicap cible directement les personnes en situation de handicap. Cela dévalorise leur vie et leur valeur. Cette mesure est discriminatoire et va à l’encontre de l’article 15 de la Charte.
La communauté des droits des personnes en situation de handicap a été claire sur la manière de protéger les personnes en situation de handicap. Il faut cesser d’essayer de donner l’impression que leurs souffrances sont différentes. Il faut rétablir l’exigence de la notion de fin de vie pour l’AMM. Il faut changer les systèmes et les conditions qui rendent la vie difficile pour tant de personnes en situation de handicap.
L’AMM pour mes mineur(e)s matures
Selon les lois actuelles, il faut obligatoirement avoir au minimum 18 ans pour faire une demande d’AMM. Le Comité envisage de supprimer cette règle. Cela pourrait porter un grave préjudice aux jeunes en situation de handicap qui sont particulièrement dépendants des adultes au niveau social et financier. Ces jeunes souffrent plus souvent de dépression, d’anxiété, de solitude et d’une faible estime de soi. Ils sont également plus touchés par les pensées suicidaires parce qu’ils sont davantage confrontés à la pauvreté, au manque d’appartenance et aux abus.
Les tribunaux offrent des protections spéciales aux mineur(e)s matures. Ils examinent, au cas par cas, si un(e) mineur(e) mature sera autorisé(e) à prendre ses propres décisions en matière de santé. Cette protection vitale serait supprimée si les lois sur l’AMM étaient étendues.
Demande anticipée d’AMM
Une demande anticipée d’AMM est une demande émanant d’une personne qui ne cherche pas à obtenir une AMM tout de suite, mais qui souhaite prendre les devants au cas où elle perdrait sa capacité à consentir. Les personnes qui ne sont pas en situation de handicap ont parfois des croyances erronées sur la qualité de vie lorsqu’on est porteur d’un handicap. Il leur est donc difficile d’imaginer et d’évaluer la douleur future. Les personnes en situation de handicap considèrent souvent que leur qualité de vie est similaire à celle des personnes qui ne sont pas en situation de handicap. Les personnes qui ne sont pas en situation de handicap ont tendance à considérer la qualité de vie des personnes en situation de handicap comme inférieure à la leur. La demande anticipée d’AMM ne devrait pas être étendue pour permettre à une personne de consentir à l’AMM pour quelqu’un d’autre, car ces décisions seraient fondées sur des stéréotypes et des stigmates sur la vie avec un handicap.
Maladie mentale en AMM
La loi canadienne permettra aux personnes atteintes d’une maladie mentale d’accéder à l’AMM à partir de mars 2023. Les personnes atteintes d’une maladie mentale présentent des vulnérabilités uniques liées à leur maladie. Par exemple : les conditions sociales qui entourent la maladie mentale et le fait que les pensées suicidaires ont tendance à être un symptôme de la maladie mentale elle-même. En raison de ces vulnérabilités, la maladie mentale devrait être exclue des catégories admissibles à l’AMM.
Ces vulnérabilités sont encore plus grandes pour les personnes ayant une déficience intellectuelle ET une maladie mentale. Elles ont plus de mal à trouver du soutien et à être diagnostiquées. Elles risquent d’être surmédicalisées et placées en institution. Cela augmente le risque qu’une personne demande une AMM, même si son état est traitable. Nous avons demandé au Comité de discuter davantage de cette question. Nous voulons qu’il s’attache à combler les lacunes en matière de soins de santé mentale pour toutes les personnes au Canada, y compris celles qui ont une déficience intellectuelle.
Soins palliatifs ou AMM
Au Canada, le soutien en matière de soins palliatifs est inadéquat, sous-financé et peu accessible, contrairement à l’AMM. Le Comité doit prendre en compte l’état des soins palliatifs au Canada et leurs effets sur les personnes en situation de handicap.
Le système canadien de surveillance de l’AMM doit être considérablement amélioré. Selon nous, le gouvernement devrait faire une étude sur les soins palliatifs et les autres supports pour les personnes en situation de handicap. Cela devrait être une priorité. Il devrait recueillir les rapports des patient(e)s en situation de handicap sur les soins qu’ils et elles reçoivent et leurs effets. Cela permettrait de déterminer si les personnes en situation de handicap font l’objet de pressions, de contraintes ou de persuasions pour se tourner vers l’AMM.
Inclusion Canada est extrêmement préoccupé par la législation actuelle entourant l’AMM et par les conséquences potentiellement négatives que cela pourrait avoir sur les personnes en situation de handicap si la législation est étendue. Notre combat contre l’AMM n’est pas terminé.